BSCNEWSJUIN2012 - Page 11 - BSC NEWS MAGAZINE JUIN 2012 : Pierre Michon, Nicolas Lormeau, Barbara Canepa, Raphaële Atlan Sébastien Giniaux, Anna Merli, Margerite Abouet, Guylaine Girard, 11 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 12 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 terminé, Barbara approuve ou corrige les dessins. C’est seulement après que nous passons à la réalisation des vignettes définitives où elles sont, là encore, enrichies de dessins et de couleurs. Avec quelles matières avez vous travaillé et pourquoi? BARBARA : Papier, encre de couleurs achetées chez des antiquaires (celles d'époque restent les meilleures) , aquarelles, écolines, crayons, acryliques , et beaucoup b e a u c o u p d e p h o t o s h o p . . . L'intervention de ce dernier outil est visible sur cette simple image , avant et après. Concernant les illustrations (de couvertures ou celles des animaux : Painter +photoshop). ANNA : Pour ma part, j’ai utilisé du papier, de l’aquarelle, des pinceaux, des penninis et des crayons. Barbara s’est servie d’aquarelles, d’ecoline et Photoshop. Nous avons souhaité marier le passé avec le présent. Car ce que nous savons aujourd’hui est le fruit du passé. L'histoire d'Elisabeth est ancrée et nous n’avons pas vu d’autre façon d’exprimer cette impression désuète. Avec les outils dont nous disposons de nos jours, nous parlons un langage accessible à tous. Comment est née graphiquement Elisabeth Weatherley? Quelles ont été vos sources d'inspiration? Vous souvenez-vous d'un moment clé dans cette recherche ? 13 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 BARBARA : Elle était dans ma tête. Il y a des choses qui ne pouvaient être autrement , comme par exemple , ses cheveux blancs. Une particularité propre à ma famille , du côté maternel, que l'on se passe de génération en génération. A 16 ans, nos cheveux deviennent tout blanc. Les miens le sont totalement, comme ceux de ma mère , et comme l'étaient ceux de ma grand-mère, dès son plus jeune âge. On appelle ça les "femmes aux cheveux de Lune." Pour ce qui est du reste , Anna et moi avons fait beaucoup de recherches. Mais Elisabeth est arrivée très vite ! Il n'a pas été difficile de lui donner vie , au contraire! Lorsque nous l'avons "trouvé ", j'ai senti qu'il manquait quelque chose : je voulais , en fait qu'elle ait une caractéristique forte sur le visage , afin de ne pas l'oublier facilement. C'est ainsi que j'ai ajouté cette rougeur autour de ces yeux , sur ses joues , afin que cela rappelle la couleur du sang , l'essence même de la vie. ANNA : J’ai le souvenir d’avoir imaginé Elisabeth quelques heures seulement après ma rencontre avec Barbara. Aujourd’hui, c’est un personnage très éloigné de ma première idée. Barbara a choisi Elisabeth entre plusieurs propositions que je lui ai faites selon ses indications. Quand j’ai dessiné Elisabeth, je n’étais pas du tout certaine que celle-ci serait choisie. J’ai du me réapproprier Elisabeth pour la dessiner à nouveau. Par la suite, je me suis apesantie pour la découvrir et la connaître. Notre inspiration est venue des fillettes de dessins animés que nous aimions à l’âge de 13 ans. 14 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 15 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 16 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 AVANT APRES Une citation, en préambule, de Virginia Woolf " la vie est un rêve et c'est le réveil qui nous tue" qui répond à votre propre vision de la vie? BARBARA : À la mienne, sûrement , oui. Vous mettez en place une esthétique victorienne, romantique et sombre: quels sont vos mentors en la matière ? BARBARA : Tous les grands peintres anglais romantiques comme W.Morris, J.W.Waterhouse ou D.G.Rossetti , mais aussi les plus connus comme G.Klimt ou A.Mucha plus proches du symbolisme et de l'Art Nouveau. Cet dernier courant d'art, en particulier, m'a toujours inspiré , surtout dans l'architecture , car cet art prend son inspiration dans la nature elle-même , surtout concernant sa "grandeur" sur l'esprit et l'âme de l'homme et l'infini même de l'univers... Pour finir, j'aime beaucoup l'art flamand et ses peintres comme Hieronymus Bosch, Jan van Eyck ou Arcimboldi (mon preferé pour sa folie). Ils m'émerveillent depuis toujours et m'épouvantent à la fois, comme lorsqu'enfant l'on voit une chose pour la première fois en restant muet et un peu effrayé , mais tout de même curieux. Chez vous-même, vous prisez les baldaquins, les décorations baroques ou est-ce le contraire? BARBARA : Ma maison est un vrai musée contenant des choses étranges , à la façon des "cabinets de curiosités" . Je n'ai rien fait d'autre que de reproduire les choses que j'aime. " C'est dans l'obscurité que la lumière est la plus belle " semble être le credo graphique de cet album...aimez-vous travailler avec les couleurs foncées, sombres? BARBARA : Je travaille de nuit , lorsque le reste de la ville est endormie.C'est là, et seulement là que les idées me viennent , mon cerveau se colore alors d'un monde fantastique. J'aime l'obscurité , cela m'inspire... Si je vois le soleil et le ciel bleu , je n'ai qu'une envie, celle de sortir et de rejoindre mes amis pour discuter à la terrasse d'un café. Le choix d'un filtre" vert" dans toutes les vignettes, c'est parce que vous vouliez une tonalité commune à l'ensemble? parce qu'il est important que règne une harmonie chromatique? 17 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 18 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 BARBARA : Nous avions à coeur de garder cette patine antique tout au long du livre , un peu comme les vieilles illustrations de la fin du 19eme siècle. Un choix obligatoire étant donné que nous aimons toutes les deux les teintes vertes et bleues. Par ailleurs, commercialement, je ne voulais pas me répéter par rapport à mon autre série , SKY DOLL, où en revanche règnent des couleurs fortes et acidulées. J'aime évoluer, changer, afin d' éviter de me répéter... ANNA : Les tons vert-bleu sont récurrents dans End car ce sont les couleurs typiques des scupltures du cimetière Staglieno de Gênes et de ces monuments vieillis. C’est précisément à cette couleur à laquelle nous avons pensé en réalisant End. Pour nous, elle exprimait au mieux notre idée de l’essence d’une nature luxuriante et impitoyable telle qu'est la forêt. Les bois sont des endroits qui enferment les peurs de tout un chacun : la mort, la perte, l’abandon et la solitude qui se développent. En s’enfonçant dans la forêt ou dans le jardin d’Elisabeth, c'est le seul ton qui perce car nous n’aurions pas pu en utiliser d’autres.. L'héroïne principale détient un terrible pouvoir... cette faculté morbide, c'était pour donner plus de prix à la vie? ANNA : Le pouvoir d’Elisabeth est celui en somme de chaque être vivant mais amplifié. Car chacun s’il le souhaite peut donner ou supprimer ce pouvoir. Chez certains, il est inné. Le lierre étouffe pour sa propre survie mais ne décide pas de tuer. Tout comme une mère peut mourir en donnant naissance à son fils sans que cela soit pour autant un suicide. Chacun de nous peut choisir sa conduite et son comportement. En somme, nous avons le même pouvoir qu’Elisabeth. il est donc facile de s’identifier à elle. Parfois, nous pouvons bénéficier de certains dons dont nous ne prenons pas conscience, que nous ne voulons pas ou qui nous a été imposé génétiquement. Nous n’avons pas choisi de naître et, pour la plupart d’entre nous, ne ferons pas le choix de mourir. Elisabeth a la charge de coordonner notre destin à tous. Alors imaginons un instant devoir 19 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012 20 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 48 - JUIN 2012
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