BSCNEWS JUIN2014 - Page 73 - BSC NEWS MAGAZINE - JUIN 2014 - Daniel Goossens, Kukula, leticia Moreno, Julien Dérôme, Alonzo King, Bernard Kudlak, Cirque Plume, David Krakauer, Anny Romand, Jasz, Elsa Brants, 73 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 ▶︎ La lettre à Helga de Bergsveinn Birgisson Editions Zulma Traduit du finnois par Catherine Eyjólfsson 144 pages - 16,50 € et sa culture, ses traditions, ses aspirations sociales et ses conventions. Bergsveinn Birgisson a merveilleusement travaillé à cette alchimie, tissant dans la soie même de son texte l'expression étonnante de ce berger éperdu d'amour pour Helga, fermière à qui il rend fréquemment visite en tant que contrôleur pour le Mouvement Coopératif islandais. Le texte tient en équilibre sur cette dualité étonnante entre l'existence rude de Bjarni Gislason de Kolkustadir du fait même de sa condition d'éleveur et de cette poésie " dans le coeur" comme aime le rappeler Bergsveinn Birgisson. La lettre à Helga est un roman éblouissant et passionnant de bout en bout où Bergsveinn Birgisson a su mettre en musique une belle et déchirante mélodie qui restera comme une pépite de la littérature islandaise. Remarquable initiative de la part des Éditions Zulma d'avoir choisi d'inscrire ce titre à leur catalogue et de le mettre à la disposition des lecteurs français. Sale temps pour l’amour où les «Je t’aime » sont démodés. L’on passe son temps à chercher l’amour, à envier notre meilleure copine qui est en couple depuis des lustres, à se plaindre de notre célibat, à craindre la rupture. Mais osons-le dire l’amour n’est pas si glamour… Quelle erreur de vivre le célibat comme une tare, de mettre les hommes sur un piédestal. Fini les films à l’eau de rose ! Cet ouvrage est un guide qui vous fera accepter le célibat, la rupture ou encore la vie de couple, car avouons-le, la vie à deux ce n’est pas le mieux. Ce code vous dit tout sans tabou ! Le code de l’amour de Lynda lynn Prix de vente : 17,90€ Livre et 4,99€ le ebook téléchargeable page 257 pages ISBN : 978-2-36849-472-1 En vente sur amazon.fr 7 écrit Editions 74 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 «L’histoire de l’Europe de l’immédiat après-guerre n’est donc pas avant tout celle de la reconstruction et de la réhabilitation-c’est d’abord l’histoire d’un continent qui sombre dans l’anarchie» On a tendance à considérer que la guerre et la violence destructrice qui l’accompagne prennent fin le 8 mai 1945 lorsque l’Allemagne capitule. L’ouvrage de Keith Lowe vient opportunément nous éclairer sur le chaos et la barbarie qui perdurent malgré la défaite des puissances de l’axe. Chaos et barbarie dus à des institutions en convalescence et à la violence inouïe des troupes nazies lors de l’occupation des terres conquises qui appelait à la vengeance. Vengeance des prisonniers des camps à l’égard de leurs geôliers, celle des travailleurs forcés à l’égard des civils allemands que les troupes alliées avaient de la peine à contenir. Ainsi à Hanovre, des dizaines de milliers d’anciens travailleurs mirent la ville à sac en pillant des magasins et en maltraitant des civils. Mais il n’y eut pas que la population allemande qui fut victime des suites du second conflit mondial, les prisonniers de guerre allemands eurent eux aussi à en payer CHRONIQUE PAR Régis Sully L’EUROPE BARBARE HISTOIRE 75 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 le prix, surtout ceux aux mains des Russes. Dans les pays occupés, les collaborateurs ou ceux et celles qui étaient soupçonnés d’avoir établi des liens avec l’occupant eurent maille à partir avec les forces de la résistance et d’une manière plus dure l o r s q u e c e l l e s - c i doutaient de la f e r m e t é d e l e u r nouveaux pouvoirs en place comme en Italie et en France. A la vengeance à l’encontre de certaines nationalités comme les Allemands ou les Hongrois viennent s ’ a j o u t e r d e s expulsions massives dues au nouveau tracé des frontières. Ainsi près de 12 millions d’Allemands furent c h a s s é s d e l e u r s régions où ils avaient vécu. Mais les violences, quelle que soit la forme qu’elles revêtirent, brutalités, exécutions ou expulsions ne furent pas le lot des seuls Allemands ou de leurs alliés. Le cas le plus emblématique et en même temps le moins connu est «le nettoyage ethnique» pour reprendre l’expression de l’auteur qui eut lieu, après le conflit, à l’intérieur des nouvelles frontières polonaises pratiqué avec l’assentiment des autorités voire à leur initiative. Bien sûr, la population allemande des nouvelles régions annexées ( Silésie, Poméranie Prusse orientale) fut contrainte de tout abandonner, mais plus à l’Est, les Ukrainiens furent renvoyés à l’intérieur de leurs nouvelles frontières quand ils ne furent pas massacrés (on dénombre environ 20 000 victimes). N’accablons pas les Polonais car près de 90 000 d’entre eux périrent en Vo l hy n i e ( r é g i o n d e l’Ukraine) en Galicie principalement, victimes d e s n a t i o n a l i s t e s ukrainiens. Je laisse au lecteur le soin de découvrir ou de redécouvrir les g u e r r e s c i v i l e s e n Yougoslavie et en Grèce. Au total, retenons que les violences qui ont suivi le second conflit mondial f u r e n t i m p o r t a n t e s , d’ailleurs plus répandues en Europe orientale. R e t e n o n s é g a l e m e n t qu’elles minimisent, ni relativisent, en rien les crimes horribles perpétrées par les Nazis car elles sont loin d’atteindre leur ampleur. Lecture utile pour les Européens que nous sommes. ■L’Europe barbare de Keith Lowe Editions Perrin Prix : 25 € 76 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 CHRONIQUE PAR MARC EMILE BARONHEID Lire est le propre de l’homme ROMAN L’auteur, l’éditeur, le chroniqueur sont trois chaînons essentiels du parcours entre le livre et son lecteur. Les voici sous le feu des projecteurs. Larbaud ou Bradbury ? L’un faisait l’éloge de la lecture, l’autre rêvait que des pompiers allaient brûler tous les livres. A en croire l’agressivité de son entrée en matière, le jeune (22 ans) Pierre Ménard serait résolument du côté de Fahrenheit 451. Tout au long d’une démonstration articulée en 20 chapitres maniant l’outrance calculée et affichant une information littéraire déjà fournie, Ménard (un nom difficile à porter, par les temps qui courent) 77 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 tente de se faire les dents sur la lecture, cause de tous les maux. Vous voulez finir à l’asile comme Nerval, rejoindre les lecteurs que Goethe a poussés au suicide, devenir la « vieille juive fardée » que Claudel voyait en Proust, « brouter la poussière des ennuyeux ouvrages de votre bibliothèque », participer à la déforestation planétaire ? Rien de plus simple : lisez, euthanasiez-vous socialement, sentimentalement, économiquement. Et qui voudrait de q u e l q u ’ u n q u i s q u a t t e perpétuellement les cabinets au motif que c’est l’endroit rêvé pour entrer en communion avec Amélie Nothomb ? Existe-t-il un antidote à la lecture comme le plus funeste des pousse-aucélibat ? Peut-être le dicton « Femme qui lit est à moitié dans ton lit »… Don Quichotte ou Oncle Picsou ? L’éditeur n’est pas seulement quelqu’un qui mise sur un auteur en espérant décrocher la timbale. La corporation s’honore de découvreurs, de partenaires enthousiastes, de beaux esprits, de viveurs, de dandys, de jansénistes. Un fort volume retrace le parcours de treize de ces merveilleux fous éditant avec leur drôle de tiroir-caisse. Ils ont en commun d’avoir vécu un moment de grâce de l’édition, au tournant des années 1960. Est-ce pour cela seulement que l’on n’y trouve nulle trace d’un Hubert Nyssen, ou parce que l’auteur est empêtré dans les filets germanopratins, notamment lorsqu’il emboîte le pas au Milieu, pour évoquer Robert Laffont. Un Laffont regardé avec condescendance et frappé d’une épitaphe du même tonneau : « Plus que la bonne littérature, ce qui aura singularisé la politique éditoriale de Robert Laffont aura été la quête du bonheur de lire et de le faire partager au plus grand 78 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 nombre ». Mais comment devient-on un bon éditeur ? Il faut de la curiosité, de la chance, de l’audace, de la ténacité, de la passion, du calcul, du respect, de l’exigence, de l’humilité, de l’indépendance, de l’entregent, de l’autorité, de la diplomatie, parfois le sens de l’intrigue, de la conspiration, l’art de connaître le juste prix d’un homme ou le point d’ébullition de son ego. De Christian Bourgois à Françoise Verny, des accoucheurs dont beaucoup sont « autodidactes aux itinéraires sinueux ». Sacrebleu, des autodidactes, ces Brasse-Bouillon des limbes académiques ! On veut croire que l’auteur de ce passionnant document - dont la longue litanie de notes évoque un thésard psychorigide - ne leur préfère pas les itinéraires sirupeux, si commodes dans son monde aux manchettes de lustrine. Un goguenard déterminé. Dans sa préface à la première édition (1998) des chroniques littéraires les plus coruscantes de Renaud Matignon, Jacques Laurent le regardait comme « Un garçon très sympathique et qui l’est resté toute sa vie, chose rare ». Gageons que les Sollers, Hallier et autres bénéficiaires de ses sarcasmes étaient d’un autre avis. Même en ayant lu Dale Carnegie, il est difficile d’arbitrer les élégances littéraires et de ne compter que des amis. Ce serait inquiétant. Epris de liberté de blâmer, Matignon se ralliait plutôt à l’étendard de Beaumarchais. Le grand amateur de Blondin ou Aymé était prompt à dégainer un humour meurtrier, sitôt qu’il débusquait un maladroit, un faiseur, une baudruche. La table des matières est une invitation au voyage à laquelle il serait inopportun de résister. Personne ne partagera l’ensemble de ses dilections, ni ne cautionnera tous ses dynamitages. Mais lorsqu’un soufflet est donné avec talent, quand un hommage porte la livrée de l’admiration, on oublie pour un temps que l’engagement philosophique de 79 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 leur auteur n’est pas nécessairement le nôtre. Quitte à faire ensuite la part des choses, un exercice de salubrité dont on donne crédit à Matignon. Il n’y a rien d’illogique dans la juxtaposition des affinités électives et des exécutions sardoniques. « Claude Mauriac est écrivain héréditaire. Conscient très tôt du privilège qui fut le sien d’avoir pour père François Mauriac, fasciné par lui et submergé par le tourbillon de talents et d’intelligences qui ont fait cortège à sa propre jeunesse, il s’est résolu à être fils comme d’autres décident qu’ils seront aviateurs ». Matignon n’a croisé ni Angot, ni Houellebecq. Il a juste eu le temps d’assaisonner Djian et de cataloguer l’ineffable Nabe « Enterré sous les oripeaux d’un Artaud pour jeux télévisés et d’un Rimbaud de snackbar M. Nabe y a cru ». Un cocktail pour l’éternité de l’été. « 20 bonnes raisons d’arrêter de lire », Pierre Ménard, Cherche Midi, 12 euros « Les hommes de l’ombre – portraits d’éditeurs », François Dosse, Perrin, 25 euros, notes, index « La liberté de blâmer… - Quarante ans de critique littéraire », Renaud Matignon ; préface de Jacques Laurent ; introduction d’Etienne de Montéty, Bartillat, 18 euros 80 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 CHRONIQUE PAR EMMANUELLE DE BOYSSON / Photo Cyril Moreau L’amour, plus fort que la mort ROMAN Jeune caissière dans une supérette, Eden a été adoptée et ne sait pas qui est son géniteur. Une nuit, elle reçoit un coup de fil qui lui apprend à la fois le nom et la mort récente de son père biologique. Elle se rend à l’enterrement, n’a aucune envie de « rencontrer cette famille qui l’a rejetée ». En parallèle à son histoire, Hugues Royer donne la parole à William le père qui vient de mourir d’un accident de la route. Il observe les vivants. Il venait de se fiancer. Son esprit plane au-dessus d’Eden. Un jour, elle entend une voix : « Est-ce que tu m’entend ? » Hugues Royer s’interroge sur la filiation, mais aussi sur la vie après la mort. Un roman sensible, d’une grande finesse psychologique où les personnages en quête d’identité et de résilience vous bouleversent, vous aident à surmonter le deuil, le manque d’amour, comme s’ils vous prenaient par la main. Flirtant avec le rêve et le surnaturel, ce roman tendre et profond écrit à la pointe du cœur, restera longtemps dans vos mémoires. 81 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 Comment vous est venue l’idée d’écrire ce roman ? J’étais sur une plage, en juillet, sur l’île d’Oléron. Le ciel était chargé de nuages, sublime, et j’ai eu envie d’imaginer ce qui pouvait se passer là-haut… Qu’est-ce qui vous a poussé à explorer la quête de lien entre une jeune femme et son père biologique qu’elle n’a pas connu ? Je suis moi-même papa et la question de la filiation est un des plus grands mystères auquel tous les parents du monde sont confrontés. D’une certaine façon, nos enfants permettent à une partie de nos gènes de survivre ; et en même temps, ils sont radicalement différents de nous. Parlez-nous des personnages d’Éden et de William, pour lesquels vous éprouvez de la tendresse… Éden est une jeune femme en quête d’identité parce qu’elle a été abandonnée. C’est un personnage solaire, généreux, tourné vers les autres. J’aimais l’idée qu’elle travaille comme caissière pour payer ses études de psychologie. William, son père, est un personnage beaucoup plus torturé, un scénariste reconnu, mais qui se rêve écrivain. Pourquoi avez-vous choisi de permettre à William mort dans un accident de la route d’observer les vivants, de s’interroger sur sa vie et d’entrer en relation avec sa fille ? Il est mort trop tôt, à 37 ans, avec le sentiment qu’il lui restait beaucoup à faire. Alors il fait de la résistance : plutôt que de lâcher prise pour pouvoir s’élever, il observe les vivants, frustré d’avoir perdu sa place au milieu d’eux. Vous rendez William très bienveillant, mais il éprouve des remords. Avez-vous voulu qu’il tente de réparer l’abandon de sa fille, de combler le manque ? Exactement ! Sa mort va être une chance pour lui de réparer l’erreur de sa vie : avoir laissé, il y a longtemps, sa compagne disparaître avec leur fille alors qu’elle était bébé. Une erreur qu’il ne se pardonne pas et qui l’a privé du bonheur de voir grandir Eden. William en veut aussi à son « meurtrier ». Surmonte-t-il sa rancune ? Ne dévoilons pas trop l’histoire... Mais vis-à-vis de l’homme qui a provoqué sa mort, il y a tout, c’est vrai, tout un parcours initiatique qui doit faire passer 82 - BSC NEWS MAGAZINE - N° 70 - JUIN 2014 William du ressentiment au pardon. En sera-t-il capable ? Comment arrive-t-il à dépasser le chagrin d’être séparé à jamais de sa fiancée, Katsuko ? Katsuko est une scientifique pur jus, hermétique à ses appels. À force d’échouer à communiquer avec elle, William se fait une raison. Et puis, ses retrouvailles avec Éden vont peu à peu combler son manque affectif. De son côté, avez-vous désiré qu’Éden pardonne, retrouve confiance ? En un mot, vit-elle à travers cette expérience, une forme de résilience ? Eden en a longtemps voulu à son père biologique, qu’elle regardait comme un « salaud », sans connaître la vérité sur son passé. Mais là encore, elle va apprendre à le regarder autrement. Oui, vous avez raison, on peut parler d’une forme de résilience. Pensez-vous qu’il puisse y avoir une vie après la mort ? Que les disparus nous font signe ? C’est une hypothèse que j’ai développée dans mon roman. Une hypothèse rassurante pour ceux qui ont perdu un être cher. De nombreux lecteurs m’ont d’ailleurs confié avoir été apaisés après avoir lu « Est-ce que tu m’entends ? » C’est le plus beau compliment qu’on puisse m’adresser. William est écrivain, croyez-vous que les livres nous survivent, que nous écrivons pour laisser une trace ? Et vous, qu’est-ce qui vous pousse à écrire ? Depuis quand écrivez-vous ? Même si l’idée de postérité me semble un peu vaine, les livres nous survivent, c’est un fait. Ils constituent une empreinte de notre passage sur Terre. J’écris depuis que je suis adolescent, pour apaiser mes angoisses, exprimer ce que je ressens, crier ma différence aussi – nous sommes tous différents. En un mot, tenter de dormir tranquille ! Ce roman puise-t-il ses racines dans votre vie personnelle ? Jamais je n’aurais écrit ce livre si mon père n’était pas décédé d’un cancer fulgurant en 2009. Il n’est pas impossible, d’ailleurs, que j’aie inventé toute cette histoire pour me donner une chance de dialoguer avec lui une dernière fois… En quoi consiste votre travail à Voici ? Je suis chargé de traiter avec humour l’actualité des célébrités. De trouver des
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