Lire un extrait de Samantha bonne à rien faire de Sophie Kinsella - Page 2 - Le Code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes de l’article L.þ122-5, 2o et 3o a), d’une part, que les «þcopies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collec- tiveþ» et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, «þtoute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illiciteþ» (art. L.þ122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, consti- tuerait donc une contrefaçon, sanctionnée par les articles L.þ335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle. ©þ2005 Sophie Kinsella. Tous droits réservés. Et pour la traduction française. ©þ2007, Belfond, un département de . ISBNþ: 978-2-266-18138-9 Le papier de cet ouvrage est composé de fibres naturelles, renouvelables, recyclables et fabriquées à partir de bois provenant de forêts plantées et cultivées durablement pour la fabrication du papier. Titre originalþ: THE UNDOMESTIC GODDESS publié par Bantam Press, a division of Transworld Publishers, Londres. Tous les personnages de ce roman sont fictifs, et toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou mortes, serait pure coïncidence. 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 6 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 À Linda Evans 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 7 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 9 1 Êtes-vous stresséeþ? Non. Pas du tout. Je suis… débordée. Comme tout un tas de gens. C’est la vie. J’ai un bon job auquel je tiens et qui me plaît. C’est vrai, parfois je suis un peu tendue. Ou sous pression. Mais, nom de Dieu, je suis avocate à Lon- dres. Vous croyez que je me tourne les poucesþ? Bon sang, j’ai appuyé tellement fort en écrivant que j’ai transpercé la feuille. Tant pis. Passons à la ques- tion suivante. Combien d’heures, en moyenne, passez-vous à votre bureau chaque jourþ? 14 12 8 Ça dépend. Faites-vous régulièrement de l’exerciceþ? Je nage régulièrement Je nage de temps en temps J’ai l’intention de m’inscrire à la piscine. Quand j’aurai le temps. J’ai eu plein de boulot, ces derniers temps, c’est de la folie. 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 9 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 10 Buvez-vous huit verres d’eau par jourþ? Oui Parfois Non. Je pose mon stylo et me racle la gorge. À l’autre bout de la pièce, Maya finit de classer ses petits pots de cire et ses vernis à ongles. Maya est mon esthéti- cienne pour la journée. Ses cheveux foncés sont ramenés en une grande natte éclaircie par une mèche blanche et une de ses narines est agrémentée d’un minuscule clou en argent. —þDes problèmes avec le questionnaireþ? demande- t-elle d’une voix douce. —þJe vous ai dit que j’étais assez pressée, fais-je poliment. Je dois répondre à toutþ? —þNous avons besoin du maximum de renseigne- ments pour évaluer vos besoins nutritionnels et esthétiques, m’assure-t-elle d’un ton apaisant mais implacable. Je regarde ma montre. Dix heures moins le quart. Je n’ai pas de temps à perdre. Vraiment pas. Mais c’est mon cadeau d’anniversaire et j’ai promis à Freya, ma meilleure amie, que je me ferais faire le soin qu’elle m’a offert dans ce spa. Pour être plus précise, c’est l’année dernière que Freya m’a offert ce bon pour une «þsession de détente absolueþ». On est copines depuis l’enfance, et elle n’arrête pas de m’engueuler parce que je travaille trop. Avec le bon, il y avait une carte qui disaitþ: Samantha, occupe-toi de toiþ!!!! C’était bien mon intention. Mais on a dû s’occuper de la restructuration du groupe des Pétroles Zincon, de la fusion de Zeus Minerais, et je n’ai pas eu un instant à moi depuis plus d’un an. Je suis avocate d’affaires, 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 10 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 11 spécialisée dans la finance, chez Carter Spink. C’est la folie totale en ce moment, mais ça va sûrement se calmer. Il faut que je tienne encore au moins deux semaines. Et puis quand cette année Freya m’a envoyé une nouvelle carte d’anniversaire, j’ai vu que mon bon ne serait bientôt plus valable. Et me voilà, le jour de mes vingt-neuf ans, assise sur un canapé, vêtue d’un pei- gnoir blanc et d’une culotte en papier absolument surréaliste. Je dispose de ma demi-journée. Je n’ai pas une minute de plus. Vous fumezþ? Non. Vous buvezþ? Oui. Faites-vous régulièrement la cuisineþ? À quoi ça rimeþ? En quoi la cuisine maison serait- elle meilleure qu’une autreþ? Je finis par écrireþ: Je suis un régime nutritionnel varié. C’est la stricte vérité. Tout le monde sait que les Chinois vivent plus longtemps que nous – quoi de plus sain que leur cuisineþ? Et puis la pizza, c’est méditer- ranéen. Et donc plus sain que la cuisine maison. D’après vous, votre vie est-elle équilibréeþ? Oui N Oui. —þJ’ai finiþ! Je rends le questionnaire à Maya, qui parcourt mes réponses à la vitesse d’un escargot. Comme si on n’avait rien d’autre à faire. C’est peut-être son cas. Mais moi, je dois être au bureau à une heure. —þD’après vos réponses, déclare Maya en me regar- dant longuement, vous êtes vraiment très stressée. 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 11 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 12 Quoiþ? D’où elle sort çaþ? J’ai bien précisé que je n’étais pas du tout stressée. —þMais pas du toutþ! lui réponds-je avec un sourire particulièrement décontracté. Elle ne semble pas convaincue. —þVous êtes sûrement sous pression à votre travail. —þLa tension me réussit. C’est vrai. Je le sais depuis… Oh, depuis que ma mère me l’a dit, quand j’avais huit ans. «þSamantha, la tension te réussit.þ» On est tous comme ça dans la famille. C’est un peu notre devise. À part mon frère Peter. Depuis sa dépression ner- veuse. Mais sinon on est tous comme ça. J’adore mon boulot. J’adore dénicher la faille d’un contrat. Les négociations m’excitent, je jubile quand je trouve l’argument qui tue. Parfois, j’ai l’impression qu’on me surcharge de tra- vail, que je croule sous le poids des dossiers, que je dois tenir le coup malgré tout, même si je suis au bord de l’épuisement… Mais tout le monde est comme ça. Ça n’a rien d’exceptionnel. —þVotre peau est affreusement déshydratée, cons- tate Maya en secouant la tête. Elle promène son doigt sur ma joue, s’arrête sur mon cou, l’air soucieux. —þVotre pouls est très rapide. Ce n’est pas sain. Êtes-vous plus particulièrement tendue en ce momentþ? —þNon, mais j’ai beaucoup de travail. Ça va passer. Sinon je vais bien. On peut passer à autre choseþ? —þParfait, dit Maya. Elle appuie sur un bouton encastré dans le mur et un air de flûte de Pan emplit la pièce. 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 12 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 13 —þVous avez fait le bon choix, Samantha. Notre mission consiste à vous relaxer, à vous revitaliser et à vous détoxiquer. —þMerveilleux. Je n’ai écouté que d’une oreille. Je viens de me rap- peler que je dois téléphoner à David Elldridge au sujet du contrat pour le pétrole ukrainien. J’aurais dû le faire hier. Merde. —þNous sommes là pour vous accueillir dans une oasis de tranquillité, loin de vos soucis quotidiens. Maya appuie sur un autre bouton, et la lumière devient tamisée. —þAvant que nous commencions, avez-vous des questions à me poserþ? —þOuiþ! —þParfaitþ! dit-elle, rayonnante. C’est au sujet du soin d’aujourd’hui ou c’est plus généralþ? Je me penche vers elle. —þJ’aimerais envoyer un petit mail. Son sourire se fige. —þCe sera très rapide. J’en ai pour deux secondes… —þAllons, allons, vous êtes ici pour vous détendre. Pour vous occuper de vous. Pas pour envoyer des mails. C’est une obsessionþ! Une drogueþ! Pire que l’alcool ou la caféineþ! Non mais quelle gourdeþ! Je ne suis pas obsédéeþ! Je vérifie juste mes mails… toutes les cinq secondes. Parce que le monde peut changer en trente secondes. —þPar ailleurs, Samantha, voyez-vous un ordinateur dans cette pièceþ? —þNon. En effet, j’inspecte docilement la cabine à peine éclairée et je n’y distingue pas l’ombre d’un ordina- teur. Il n’y a que des affiches représentant diverses 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 13 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 14 positions de yoga, un carillon et, sur le rebord de la fenêtre, une série de cristaux. —þC’est pourquoi nous demandons à nos clientes de laisser leur matériel électronique au vestiaire. Les télé- phones sont interdits, tout comme les ordinateurs. Ici vous faites une sorte de retraite, vous fuyez le monde. Je prends un air soumis. —þComprisþ! Ce n’est pas le meilleur moment pour lui avouer que j’ai planqué mon Palm dans ma culotte en papier. —þBien, commençons. Étendez-vous et prenez une serviette pour vous couvrir. Veuillez enlever votre montre. —þMais j’en ai besoinþ! —þEncore une drogueþ! s’exclame-t-elle avec des petits tss-tss réprobateurs. Tant que vous êtes ici, vous n’avez pas besoin de savoir l’heure qu’il est. Elle se détourne et j’enlève ma montre à contre- cœur. Puis je réussis à m’allonger sans écraser mon Palm. J’ai bien remarqué que les portables étaient inter- dits. Et puis j’ai abandonné mon dictaphone. Mais me séparer de mon Palm pendant trois heures, pas ques- tionþ! S’il arrivait quelque chose au cabinetþ? S’il y avait une urgenceþ? D’ailleurs, ce n’est pas logiqueþ! S’ils veulent qu’on se relaxe, ils n’ont qu’à autoriser les portables et les Palm. Quelle idée de les confisquerþ! De toute façon, elle ne le verra jamais sous la serviette. —þJe commence par un massage des pieds, dit Maya en versant une sorte de lotion. Faites le vide dans votre tête. Super obéissante, je fixe le plafond. Mon esprit se vide. Il est aussi transparent que… du verre… 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 14 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 15 Et Elldridge, dans tout çaþ? J’aurais dû le rappeler. Il doit attendre ma réponse. Et s’il va cafter aux associés seniorsþ? S’il leur dit que je fais mal mon boulotþ? Jamais ils ne me nommeront associée. Je panique un peu. Je ne dois rien laisser au hasard. —þAllez… détendez-vous… votre tension baisse… Et si je lui envoyais un tout petit mailþ? En cachette, je glisse ma main sous la serviette, je tâte mon Palm et le sors avec précaution de ma culotte. Maya continue à me masser, sans se rendre compte de rien. —þVotre corps s’alourdit… votre esprit se vide… Je remonte l’appareil sur ma poitrine, j’écarte la ser- viette pour entrevoir l’écran. Dieu merci, il fait sombre dans la cabine. Je bouge le moins possible et je commence à taper d’un doigt. —þVoilà, relaxez-vous… Vous marchez sur une plage… —þOuais, ouais…, dis-je en tapant mon message. David, au sujet du contrat ZFN, j’ai revu les corrections. Nous devrions répondre… —þVous faites quoi, au justeþ? s’exclame Maya, sou- dain en alerte. —þRien du toutþ! dis-je en planquant mon Palm. Je me relaxe, c’est tout. Maya contourne le lit et découvre la bosse formée par le Palm. —þQu’est-ce que vous cachez làþ? —þRienþ! Mais mon Palm bien-aimé choisit pile son moment pour émettre un petit bip. Et merdeþ! —þTiens, une voiture qui passeþ! —þSa-man-thaþ! Vous avez un appareil électronique sur vousþ? 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 15 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12 16 Si je n’avoue pas, elle va soulever ma serviette. —þJ’envoyais un mail. Je lui montre l’objet. —þVous n’êtes qu’une accro du travailþ! s’écrie- t-elle en m’arrachant l’appareil des mains. Les mails peuvent attendreþ! Tout peut attendreþ! Vous ne savez pas vous détendreþ? —þJe ne suis pas accro au travail, je suis avocate financièreþ! Ce n’est pas du tout pareilþ! —þVous ne vous en rendez même plus compte. —þVous n’y comprenez rienþ! On traite de grosses affaires, et je ne peux pas éteindre mon Palm comme ça. Surtout pas maintenant. Je suis… comment dire… sur le point d’être nommée associée. À ces mots, mon estomac se noue. Devenir associée dans l’un des plus grands cabinets d’avocats du pays est le seul et unique but de ma vie. —þIls vont prendre la décision demain. Si ça marche, je serai la plus jeune associée de l’histoire de ce cabinet. Vous voyez l’importance du trucþ? Vous imaginez un peu… —þIl est toujours possible de tout laisser tomber pendant deux heures, m’interrompt Maya en posant sa main sur mon épaule. Vous êtes terriblement nerveuse, votre dos est tendu, votre cœur bat la chamade… vous êtes au bord du gouffre. —þJe vais très bien. —þVous êtes un paquet de nerfsþ! —þPas du tout. —þIl faut ralentir. Et vous êtes la seule à pouvoir le décider. Vous allez le faireþ? —þEuh… Je pousse un petit cri de surpriseþ: je sens des vibra- tions dans ma culotte en papier. 149288QUA_SAMANTHA.fm Page 16 Jeudi, 1. avril 2010 12:41 12
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